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que sont nées les religions, et il est inutile d’insister sur ce point. Mais, de terrifiantes, les religions sont devenues bienfaisantes, et ceci est à examiner de plus près.

De terrifiantes les religions sont devenues bienfaisantes, cela veut dire que les hommes, d’une part ont supposé, à côté des puissances mauvaises et hostiles qui les entouraient, des puissances bonnes et favorables ; d’autre part, qu’ils se sont avisés d’apprivoiser les forces hostiles par des paroles et des actes respectueux et de les convertir en puissances favorables et bienfaisantes. Ne voyez-vous pas, de tous les côtés, la faiblesse qui tremble, la faiblesse qui flatte et la faiblesse qui supplie ? « L’Instinct de faiblesse », le sentiment de sa faiblesse, voilà ce qui crée en l’homme le besoin de religion ; et ce besoin crée son organe ; et tant que le besoin subsiste l’organe dure. La religion ou métaphysique est besoin de certitude générale, besoin de certitude universelle où s’encadreront les certitudes particulières, ou de certitude fondamentale sur laquelle s’appuieront les certitudes d’usage courant. C’est donc un manque de volonté qui est, historiquement à l’origine, et moralement à la racine, de toute religion ou métaphysique ; car la volonté n’a pas besoin de certitude ; elle va vers son but d’elle-même et simplement parce qu’elle est et