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la plèbe vers les sphères supérieures ; mais par des souverains de hasard, venus des quatre coins du monde, ligures, espagnols, africains, syriens, dalmates, arabes, qui n’avaient rien de romain, qui ne tenaient en rien à l’histoire romaine, qui ne représentaient que le succès des batailles et n’étaient les élus que de quelques soldats mutinés. Fin d’une race, mentalité d’une race qui n’a plus conscience d’elle-même, qui ne sait plus se faire gouverner par le meilleur d’elle, approximativement choisi, soit par la naissance, qui n’est pas du tout un hasard, soit par l’élection, soit par une combinaison de l’élection et de la naissance ; mentalité d’une race, en un mot, qui n’a plus le sens aristocratique.

Et le règne de Louis XIV, qu’est-ce qu’il est ? Il est un roi absolu, une aristocratie militaire, une bourgeoisie administrative, un peuple dévoué à son roi et à son aristocratie, et par conséquent essentiellement aristocrate. Ce peuple ne vote pas, n’élit pas, ne se gouverne ni par plébiscites, ni par représentation. Mais il collabore et, certes, activement, au gouvernement aristocratique, en ce qu’il lui obéit et avec ardeur, avec élan et avec passion. Qu’est-ce qu’il veut en se battant comme il se bat et en travaillant comme il travaille ? Il veut que le roi soit grand, que le prince de Condé soit vain-