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contractera par affinité naturelle entre ses éléments : elle s’organisera par simple besoin d’ordre et de discipline pour une action commune, et elle dominera et asservira l’autre espèce par le seul phénomène bien connu de la prédominance de la qualité sur le nombre, et par ce seul fait que l’autre espèce n’aura pas besoin d’être asservie, s’étant asservie elle-même, s’étant donné le tempérament esclave. Il n’y a d’esclave, du reste, que celui qui, non pas est asservi, mais s’est asservi, que celui qui, non pas subit l’esclavage, mais le pratique.

Ainsi naîtra la race des maîtres, d’où pourra sortir la race des surhommes. « Ce ne sera pas seulement une race de maîtres, dont la tâche consisterait simplement à régner ; mais une race ayant sa propre sphère vitale, avec un excédent de force pour la beauté, la bravoure, la culture, les manières, et cela jusque dans le domaine le plus intellectuel ; une race affirmative qui peut s’accorder toute espèce de grand luxe ; assez forte pour n’avoir pas besoin d’un impératif de vertu ; assez riche pour pouvoir se passer d’économie et de pédanterie, se trouvant par delà le bien et le mal ; une serre pour les plantes singulières et choisies… » Cette race, Spartiate par la volonté et l’endurance, athénienne par le sens du beau, romaine