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tout cas il cherche une forme d’art où la vie et la beauté soient réalisées et soient profondément unies, où la beauté soit présentée vivante, mouvante et agissante ; et où la vie soit présentée en beauté, toujours en beauté et sous toutes les formes de beauté, musique, rythme, vers, noblesse des attitudes, union intime de la beauté et de la vie, union intime de l’état apollinien et de l’état dionysiaque, réalisation approximative de l’olympisme.

Et dans sa vie même, le Grec cherche à réaliser encore cette union qu’il rêve toujours. Activité conquérante, activité politique, activité colonisatrice, activité administrante ; et, avec cela, l’art toujours, art des poètes, art des sculpteurs, art des architectes, art des peintres. La Grèce répand et veut répandre sa vie et son art à la fois sur l’Univers. Vivre et vivre en beauté ; faire vivre le monde et le faire vivre en beauté, voilà quelle semble être sa préoccupation constante et sa perpétuelle volonté.

Et l’on peut donc considérer sa tragédie comme l’intermédiaire et l’on se risquerait à dire comme le médiateur entre le ciel grec et la terre grecque. Elle donne aux hommes la vue approximative de cette union de l’état apollinien et de l’état dionysiaque que réalisent là-haut les immortels ; et elle leur donne l’exemple de cette union de l’état