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C’est une idole pour qui la consulte sans la regarder. Regardez-la. À voir qu’elle est bâtie de matériaux et de quels matériaux elle est bâtie, vous ne tremblerez plus devant elle.

— Mais il y a la responsabilité, le sentiment de la responsabilité, qui est un fait aussi et un fait peut-être universel et qui, postérieur au commandement de la conscience, le confirme, le sanctionne et, par conséquent, le fortifie et consolide singulièrement. Je reçois, je crois recevoir un ordre intérieur, voilà le premier fait ; j’y obéis et je suis content de moi ; je n’y obéis pas et je suis mécontent de moi, voilà le second fait. Vous avez analysé le premier fait et peut-être vous l’avez dissous ; il vous reste à analyser le second.

— Volontiers. Il me semble que le sentiment de la responsabilité est une illusion. Cette illusion vous vient de ce que vous croyez savoir comment vos actes s’accomplissent, comment « s’effectue l’action humaine ». Cette créance est une erreur. Nous ne savons pas du tout comment s’effectue l’action humaine. C’est une erreur d’enfants ou de primitifs que de croire savoir comment les actions humaines s’accomplissent. Nous avons mis des siècles à apprendre « que les choses extérieures ne sont pas telles qu’elles nous paraissent. Eh bien, il en est exactement de même du monde intérieur… Tous