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quasi ῥίν, nasus, seu procurrens). Le village de Run (en Bretagne) est situé près d’un promontoire qui s’avance dans la mer entre le port Malo et l’anse de Kervenny.

Peut-être les mots hrön, reun, run, etc., ne sont-ils que des formes transposées de Horn (corne, pointe ; cfr. l’angl. horse, cheval et l’all. Ross, coursier).

Le nom du Taunus est identique au mot celtique dun, qui a pris les formes daun, taun, et qui signifie élévation, hauteur (Höhe oder Berg). De la sorte Taunus mons est un pléonasme. Au même radical se rattache le mot anglais town (ville, c’est-à-dire enceinte fortifiée primitivement construite sur une hauteur). La forme don se retrouve dans le nom du mont Snowdon (Monts neigeux), la plus haute montagne de l’Angleterre, sur laquelle Halley et Derham firent des expériences pour calculer les hauteurs de l’atmosphère, et trouver une méthode qui permit de mesurer la hauteur des montagnes.

Le Hohe-Venn. — Ce nom désigne chez les Allemands la partie septentrionale des Ardennes. Nous pourrons constater ici la méthode bizarre qui préside à la déformation des noms propres.

Le mot Hohe-Venn n’est qu’une traduction inintelligente du mot celtique Ard-uenna : en celtique, ard signifie « haut » (hoch, jad. hoh, élevé, éminent, haut). Ne sachant que faire du suffixe uenna, on l’a transformé en ven, qui se rapprochait du gothique fani [nom. et accus. plur. fanja], boue, fange) et du v. h. all. fenni (marais). Ce mot s’est conservé, dans les dialectes bas allemands, sous les formes fenn, venne, veen (en angl. fen). De Hohe-Venn, les Belges ont fait Haute-Fagne (en vallon, fagne est notre mot fange).

Ainsi l’inintelligence d’un mot celtique qui signifie « haute montagne » a transformé une chaîne de « Hautes-montagnes » en une chaîne de « Hautes-fanges. »