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SOUVENIRS ENTOMOLOGIQUES

génicux appareils, elle nous infuserait notre ration d’énergie solaire, dépensée après en mouvement. Où se remonterait la machine sans le secours, souvent pénible, de l’estomac et de ses annexes ? Ah ! le délicieux monde, où l’on déjeunerait d’un rayon de soleil !

Est-ce rêverie ? est-ce prévision d’une lointaine réalité ? Sur la possibilité de ce problème, l’un dos plus hauts que la science puisse agiter, écoutons d’abord le témoignage des jeunes Lycoses.

Sept mois durant, sans aucune nourriture matérielle, elles dépensent de la force en mouvements. Pour remonter le mécanisme de leurs muscles, elles se restaurent directement de chaleur et de lumière. À l’époque où la sacoche des œufs lui traînait au bout du ventre, la mère, aux meilleurs moments de la journée, venait présenter sa pilule au soleil. Des deux pattes d’arrière, elle l’exhaussait hors du terrier, en pleine clarté ; doucement elle la tournait, la retournait, afin que chaque face reçût sa part de la vivifiante radiation. Or ce bain de vie, qui a donné l’éveil aux germes, maintenant se continue pour maintenir actifs les tendres nouveau-nés.

Chaque jour, si le ciel est clair, la Lycose, chargée de ses petits, remonte du fond du terrier, s’accoude à la margelle et de longues heures stationne au soleil. Là, sur l’échine maternelle, les jeunes délicieusement s’étirent, se saturent de chaleur, se chargent de réserves motrices, s’imprègnent d’énergie.

Ils sont immobiles, mais pour peu que je souffle sur eux, vivement ils trépignent comme au passage d’un ouragan. À la hâte ils se dispersent, à la hâte ils se rassemblent, preuve que, sans aliment matériel, la machiuelte animale est toujours sous pression, apte à