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SOUVENIRS ENTOMOLOGIQUES

mis, s’était habitué aux divers poisons. Par degrés, il s’était fait un estomac réfractaire aux toxiques. En sa qualité de mangeur de Vipères, le Hérisson, nouveau Mithridate, aurait-il acquis son immunité par une accoutumance graduelle ? Chez lui, ne serait-ce pas plutôt aptitude originelle ? Quand il broya pour la première fois la tête du reptile, n’avait-il pas déjà les prédispositions nécessaires à sa sauvegarde ?

Il les avait, nous répond la larve de Cétoine. Si quelqu’un, parmi la gent insecte, doit se prémunir contre les atteintes du Scorpion, ce n’est certes pas le ver hôte des pourritures végétales. L’un et l’autre ne fréquentent pas les mêmes lieux, ce qui rend leur rencontre à peu près impossible. De la part de la larve donc, pas d’accoutumance au venin. Les premières en présence du Scorpion sont peut-être celles que j’y expose moi-même. Néanmoins, sans préparatifs d’aucune sorte, voici que le ver est réfractaire à la piqûre. Il y a en lui, d’origine, une résistance au venin tout aussi surprenante que celle du mangeur de reptiles.

Que le Hérisson, préposé à l’extermination des Vipères, soit doué des prérogatives nécessaires à son métier, c’est d’une correcte logique. De même, le plus bel oiseau des provinces méditerranéennes, le Guêpier, se gonfle impunément le jabot de Guêpes vivantes ; de même, sans prurit, le Coucou se hérisse l’estomac de palissades en poils urticants venus de la Processionnaire. La fonction exercée le veut ainsi.

Mais en quoi la larve de la Cétoine a-t-elle bisoin de se garantir du Scorpion, qu’elle ne rencontre probablement jamais ? On n’ose croire à des privilèges ; on soupçonne plutôt une aptitude générale. La larve de Cé-