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SOUVENIRS ENTOMOLOGIQUES

due ; de leur extrémité, sensible ainsi qu’un doigt, elles rencontrent le Scorpion immobile. À l’instant, la bête affolée rétrograde. Le circuit la ramène à l’ennemi. Nouveau contact et nouvelle fuite.

Mais le Scorpion est maintenant sur ses gardes, l’arc de la queue tendu et les pinces ouvertes. Revenue au point dangereux de sa piste circulaire, la Scolopendre est saisie des tenailles, au voisinage de la tête. En vain la longue bête à souple échine se contorsionne et enlace ; imperturbable, l’autre ne serre que mieux des pinces ; soubresauts, lacs noués et dénoués ne parviennent à lui faire lâcher prise.

Cependant le dard travaille. À trois, à quatre reprises, il plonge dans les flancs du Myriapode, qui, de son côté, ouvre tout grands ses crocs à venin et cherche à mordre sans y parvenir, l’avant du corps étant maintenu par les tenaces pinces. Seul le train d’arrière se débat et se tortille, se boucle et se déboucle. Efforts inutiles. Tenus à distance par les longues tenailles, les crochets empoisonnés de la Scolopendre ne peuvent agir. J’ai vu bien des batailles entomologiques ; je n’en connais pas de plus horrible que celle entre ces deux monstruosités. Cela vous donne la chair de poule.

Une accalmie me permet de séparer les combattants et de les isoler. La Scolopendre lèche ses blessures saignantes et en quelques heures reprend vigueur. Quant au Scorpion, il n’a subi aucun dommage. Le lendemain, nouvel assaut. Par trois fois, coup sur coup, le Myriapode est lardé, et le sang coule. Crainte de représailles, alors le Scorpion recule, comme effrayé de sa victoire. La blessée ne riposte pas, elle continue sa fuite circulaire. Assez pour aujourd’hui. J’entoure le bocal d’un cylin-