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SOUVENIRS ENTOMOLOGIQUES

On dirait que la potion agit ; la santé semble revenir. Il n’en est rien, hélas ! Le septième jour après la piqûre, le malade périt. Le coup du Scorpion est inexorable pour tout insecte, même parmi les plus robustes. Tel périt à l’instant, tel autre agonise des jours ; mais enfin tous succombent. Si mon Éphippigère a survécu une semaine, je me garderai bien d’en faire honneur à ma médication par le jus de raisin ; c’est au tempérament de la bête qu’il faut attribuer la longue résistance.

Il convient surtout de prendre en considération la gravité de la blessure, très variable suivant la dose de venin inoculée. Il n’est pas en mon pouvoir d’en régler l’émission, et d’autre part le Scorpion a ses caprices lors du suintement de sa burette, avare dans tel cas, dans tel autre prodigue. Aussi la discordance est grande dans les données fournies par l’Éphippigère. Mes notes mentionnent des sujets succombant à bref délai, tandis que d’autres, et ce sont les plus nombreux, longtemps agonisent.

D’une manière générale, les Locustiens résistent mieux que les Acridiens. L’Éphippigère en témoigne, et après elle le Dectique à front blanc, chef de file de nos porteurs de sabre. L’insecte à fortes mandibules, à tête éburnéenne, est atteint vers le milieu du ventre, à la face supérieure. En apparence peu compromis, le blessé déambule, essaye de bondir. Une demi-heure après, voici que le venin le travaille. Le ventre se convulse, se recourbe fortement en crochet, et de son orifice ouvert, incapable de se refermer, sillonne les rudesses du sol. La fière bête est devenue pileux cul-de-jatte. Six heures après, l’insecte gît sur le flanc. Pour se relever et sans y parvenir, il s’exténue en ges-