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LE SCORPION LANGUEDOCIEN

languedocien et la Lycose de Narbonne. Qui des deux. pareillement outillés en crocs d’animaux, aura le dessus et mangera l’autre ? Si la Lycose est moins robuste, elle a pour elle la prestesse qui lui permet de bondir et d’attaquer à l’improviste. Avant que l’assailli, lent à la riposte, se soit mis en posture de bataille, l’autre aura fait son coup et fuira devant le dard brandi. Les chances sembleraient être en faveur de l’alerte Aranéide.

Los événements ne répondent pas à ces probabililés. Aussitôt l’adversaire aperçu, la Lycose se dresse à demi, ouvre ses crocs où perle une gouttelotle de venin et attend, intrépide. À petits pas et les pinces tendues en avant, le Scorpion s’approche. De ses mains à deux doigts, il saisit, il immobilise l’Araignée, qui désespérément proteste, ouvre et ferme ses crochets sans pouvoir mordre, maintenue qu’elle est à distance. La lutte est impossible avec tel ennemi, muni de longues tenailles, qui maîtrisent de loin, empêchent d’approcher.

Sans lutte aucune, le Scorpion courbe donc la queue, la ramène au delà du front, et plonge le dard, tout à son aise, dans la noire poitrine de la patiente. Ce n’est pas ici le coup instantané de la Guêpe et des autres bretteurs à quatre ailes ; l’arme, pour pénétrer, exige certain effort. La queue noueuse pousse en oscillant un peu ; elle vire et revire le dard ainsi que le pratiquent nos doigts pour faire entrer une pointe dans un milieu de quelque résistance. La trouée faite, l’aiguillon reste un moment dans la plaie, sans doute pour donner au venin le temps d’une large émission. Le résultat est foudroyant. Aussitôt piquée, la robuste Lycose rassemble ses pattes. Elle est morte.

Avec une demi-douzaine de victimes, je me suis per-