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LES ÉPEIRES

Je frotte ma paille exploratrice avec du papier légèrement huilé. Appliquée sur le fil spiral de la toile, maintenant elle n’adhère plus. Le principe est trouvé. Sur une Épeire vivante, je détache une patte. Mise telle qu’elle est en contact avec les gluaux, elle n’y adhère pas mieux que sur les cordages neutres, rayons et pièces de la charpente. Il fallait s’y attendre, d’après l’immunité générale de l’Araignée.

Mais voici qui change à fond le résultat. Je mets cette patte macérer un quart d’heure dans du sulfure de carbone, dissolvant par excellence des corps gras. Avec un pinceau imbibé de ce liquide, je la lave soigneusement. Cette lessive faite, la patte s’englue très bien au fil captateur, et y adhère tout autant que le ferait le premier objet venu, la paille non huilée par exemple.

Ai-je rencontré juste en considérant une matière grasse comme le préservatif de l’Épeire exposée aux perfidies de sa rosace de gluaux ? L’action du sulfure de carbone semble l’affirmer. Rien ne s’oppose d’ailleurs à ce que pareille matière, si fréquente dans l’économie animale, ne vernisse très légèrement l’Araignée par le seul fait de la transpiration. Nous nous frottions les doigts d’un peu d’huile pour manier les baguettes où devait se prendre le chardonneret ; de même l’Épeire se vernit d’une sueur spéciale pour opérer en tout point de sa toile sans crainte des gluaux.

Cependant une station trop prolongée sur les fils visqueux aurait des inconvénients. À la longue, un contact continuel avec ces fils pourrait amener certaine adhésion et gêner l’Araignée, qui doit conserver toute sa prestesse pour courir sus à la proie avant qu’elle ne se dégage. Aussi dans la structure du poste