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tonomus murinus. Pareil approvisionnement en petites espèces est encore le lot du Cerceris labiata. Enfin le plus petit des Cerceris de ma région, le Cerceris Julii [1], pourchasse les plus petits Curculionides, Apion gravidum et Bruchus granarius, gibier proportionné au frêle giboyeur. Pour en finir avec ce relevé des victuailles, ajoutons que quelques Cerceris suivent d’autres lois gastronomiques et élèvent leur famille avec des hyménoptères. Tel est le Cerceris ornata. De tels goûts sortant de notre cadre, passons outre.

Voilà donc que sur huit espèces de Cerceris dont les provisions de bouche consistent en coléoptères, sept sont adonnées au régime des Charançons et une à celui des Buprestes. Pour quelles raisons singulières les déprédations de ces hyménoptères sont-elles renfermées dans des limites si étroites ? Quels sont les motifs de ces choix si exclusifs ? Quels traits de ressemblance interne y a-t-il entre les Buprestes et les Charançons, qui extérieurement ne se ressemblent en rien, pour devenir ainsi également la pâture de larves carnivores congénères ? Entre telle et telle autre espèce de victime, il y a, sans doute aucun, des différences de saveur, des différences nutritives que les larves savent très-bien apprécier ; mais une raison autrement grave doit dominer toutes ces considérations gastronomiques et motiver ces étranges prédilections.

Après tout ce qui a été dit d’admirable par L. Dufour sur la longue et merveilleuse conservation des insectes destinés aux larves carnassières, il est presque inutile d’ajouter que les Charançons, autant ceux que j’exhumais que ceux que je prenais entre les pattes des ravisseurs, quoique privés pour toujours du mouvement, étaient dans un parfait état de conservation. Fraîcheur des couleurs, souplesse des membranes et des moindres

  1. Voir aux notes la description de cette espèce, nouvelle pour l’entomologie.