Page:Fabre - Souvenirs entomologiques, première série, 1916.djvu/317

Cette page n’a pas encore été corrigée

Chalicodomes garder l’emplacement choisi par eux, et travailler à tour de rôle tantôt à leur propre cellule, tantôt à la cellule d’autrui.

On pourrait croire que cette confusion a pour cause une étroite ressemblance entre les deux nids, car m’attendant fort peu, en mes débuts, aux résultats que je devais obtenir, je choisissais aussi pareils que possible les deux nids à substituer l’un à l’autre, crainte à rebuter les Hyménoptères. Ma précaution supposait une clairvoyance que l’insecte n’a pas. Je prends maintenant, en effet, deux nids d’une dissemblance extrême à la seule condition que, de part et d’autre, l’ouvrier trouve une cellule conforme au travail qui l’occupe en ce moment. Le premier est un vieux nid dont le dôme est percé de huit trous, orifices des cellules de la précédente génération. Une de ces huit cellules a été restaurée, et l’Abeille y travaille à l’approvisionnement. Le second est un nid de fondation nouvelle, sans dôme de mortier et composé d’une seule cellule à revêtement de cailloutage. L’insecte s’y occupe pareillement de l’amas de pâtée. Voilà certes deux nids qui ne sauraient différer davantage, l’un avec ses huit chambres vides et son ample dôme de pisé; l’autre avec son unique cellule, toute nue, grosse au plus comme un gland.

Eh bien, devant ces nids échangés et distants d’un mètre à peine, les deux Chalicodomes n’hésitent pas longtemps. Chacun gagne l’emplacement de son domicile. L’un, propriétaire d’abord du vieux nid, ne trouve plus chez lui qu’une cellule. Il inspecte rapidement le galet, et, sans autre façon, plonge dans la cellule étrangère d’abord la tête pour y dégorger le miel, puis le ventre pour y déposer le pollen. Et ce n’est pas là action imposée par la nécessité de se débarrasser au plus vite, n’importe où, d’un pénible fardeau, car l’Hyménoptère s’envole et ne tarde pas à revenir avec une nouvelle récolte, qu’il emmagasine soigneusement. Cet apport