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de ceux qui partiront aussitôt d’entre mes doigts, avec un essor franc et vigoureux. Les hésitants, les traînards qui s’arrêtent tout à côté sur un buisson, seront laissés hors de cause. En outre, j’essaierai d’évaluer de mon mieux le temps employé pour le retour au nid. Pour pareille expérience, il me faut un nombre considérable de sujets : les faibles et tous les éclopés, et ils seront peut-être nombreux, devant être mis au rebut. Le Chalicodome des murailles ne peut me fournir la collection désirée : il n’est pas assez fréquent et je tins à ne pas trop troubler la petite peuplade que je destine à d’autres observations sur les bords de l’Aygues. Heureusement j’ai chez moi, en pleine activité, sous le rebord de la toiture d’un hangar, un magnifique nid de Chalicodome de Sicile. Je peux, dans la cité populeuse, puiser en aussi grand nombre que je voudrai. L’insecte est petit, plus de moitié moindre que le Chalicodome des murailles ; n’importe : il n’y aura que plus de mérite pour lui s’il sait franchir les quatre kilomètres que je lui réserve, et retrouver son nid. J’en prends quarante, isolés, comme d’habitude, dans des cornets.

Une échelle est dressée contre le mur pour arriver au nid : elle doit servir à ma fille Aglaé, et lui permettre de constater l’instant précis du retour de la première Abeille. La pendule de la cheminée et ma montre sont mises en concordance pour la comparaison du moment de départ et du moment d’arrivée. Les choses ainsi disposées, j’emporte mes quarante captives et me rends au point même où travaille le Chalicodome des murailles, dans les alluvions de l’Aygues. La course aura double but : observation de la maçonne de Réaumur et mise en liberté de la maçonne sicilienne. Pour le retour de celle-ci la distance sera donc encore de quatre kilomètres.

Enfin mes prisonniers sont relâchés, tous marqués d’abord d’un large point blanc au milieu du thorax.