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Réaumur raconte encore comment son ami Du Hamel, ayant saisi avec des tenettes une Abeille maçonne qui était entrée en partie dans une cellule, la tête la première, pour la remplir de pâtée, la porta dans un cabinet assez éloigné de l’endroit où il l’avait prise. L’Abeille lui échappa dans ce cabinet et s’envola par la fenêtre. Sur-le-champ Du Hamel se rendit au nid. La maçonne y arriva presque aussitôt que lui, et reprit son travail. Elle en parut seulement un peu plus farouche, conclut le narrateur.

Que n’étiez-vous ici, vénéré maître, avec moi sur les bords de l’Aygues, vaste nappe de galets à sec les trois quarts de l’année, torrent énorme quand il pleut ; je vous eusse montré incomparablement mieux que la fugitive échappée aux tenettes. Vous eussiez assisté, partageant ma surprise, non à un bref essor de la maçonne qui, transportée dans un cabinet voisin, se délivre et revient aussitôt au nid, dont les environs lui sont familiers ; mais à de voyages de long cours et par des voies inconnues. Vous eussiez vu l’Abeille, dépaysée par mes soins à de grandes distances, rentrer chez elle avec un tact géographique que ne désavoueraient pas l’Hirondelle, le Martinet et le Pigeon voyageur ; et vous vous seriez demandé, comme moi, quelle inexplicable connaissance de la carte des lieux guide cette mère en recherche du nid.

Venons au fait. Il s’agit de renouveler avec le Chalicodome des murailles mes expériences d’autrefois avec les Cerceris : transporter dans l’obscurité l’insecte fort loin de son nid et l’abandonner à lui-même après l’avoir marqué. Si quelqu’un se trouvait désireux de répéter l’épreuve, je lui transmets ma manière d’opérer, ce qui pourra abréger les hésitations du début.

L’insecte que l’on destine à long voyage doit être évidemment saisi avec certaines précautions. Pas de tenettes, pas de pinces, qui pourraient fausser une aile, donner