Page:Fabre - Souvenirs entomologiques, première série, 1916.djvu/268

Cette page n’a pas encore été corrigée

Quelques heures plus tard, j’étais moi-même aux terriers. Je vis plusieurs des Cerceris de la veille, reconnaissables à leur point blanc unique sur le thorax ; mais je n’en vis aucun de ceux que je venais de relâcher. N’avaient-ils su retrouver leur domicile ? Étaient-ils en expédition de chasse, ou bien se tenaient-ils cachés dans leurs galeries pour y calmer les émotions d’une telle épreuve ? Je ne sais. Le lendemain, nouvelle visite de ma part ; et cette fois, j’ai la satisfaction de trouver à l’ouvrage, aussi actifs que si rien d’extraordinaire ne s’était passé, cinq Cerceris à double point blanc sur le thorax. Trois kilomètres au moins de distance, la ville avec ses habitations, ses toitures, ses cheminées fumeuses, choses si nouvelles pour ces francs campagnards, n’avaient pu faire obstacle à leur retour au nid.

Enlevé de sa couvée, et transporté à des distances énormes, le Pigeon promptement revient au colombier. Si l’on voulait proportionner la longueur du trajet au volume de l’animal, combien le Cerceris, transporté à trois kilomètres et retrouvant son terrier, serait supérieur au Pigeon ! Le volume de l’insecte ne fait pas un centimètre cube, et celui du Pigeon doit bien égaler le décimètre cube, s’il ne le dépasse pas. L’Oiseau, un millier de fois plus gros que l’Hyménoptère, devrait donc, pour rivaliser avec celui-ci, retrouver le colombier à une distance de 3000 kilomètres, trois fois la plus grande longueur de la France du nord au sud. Je ne sache pas qu’un Pigeon voyageur ait jamais accompli pareille prouesse. Mais puissance d’aile et encore moins lucidité d’instinct ne sont pas qualités se mesurant au mètre. Le rapport des volumes ne peut ici se prendre en considération ; et l’on ne doit voir dans l’insecte qu’un digne émule de l’oiseau, sans décider à qui des deux revient l’avantage.

Pour revenir au colombier et au terrier, lorsqu’ils