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à la fois, et le voilà en route, tirant, traînant à la force des reins et des mâchoires.

Parfois le trajet s’accomplit tout d’une traite ; parfois et plus souvent, le voiturier tout à coup laisse là sa charge et accourt rapidement chez lui. Peut-être lui revient-il que la porte d’entrée n’a pas l’ampleur voulue pour recevoir ce copieux morceau ; peut-être songe-t-il à quelques défectuosités de détail qui pourraient entraver l’emmagasinement. Voici qu’en effet l’ouvrier retouche son ouvrage : il agrandit le portail d’entrée, égalise le seuil, consolide le cintre. C’est affaire de quelques coups de tarses. Puis il revient à l’Éphippigère, qui gît là-bas, renversée sur le dos, à quelques pas de distance. Le charroi est repris. Chemin faisant, le Sphex paraît saisi d’une autre idée, qui lui traverse son mobile intellect. Il a visité la porte, mais il n’a pas vu l’intérieur. Qui sait si tout va bien là-dedans ? Il y accourt, laissant l’Éphippigère en route. La visite à l’intérieur est faite, accompagnée apparemment de quelques coups de truelle des tarses, donnant aux parois leur dernière perfection. Sans trop s’attarder à ces fines retouches, l’Hyménoptère retourne à sa pièce et s’attelle aux antennes. En avant ; le voyage s’achèvera-t-il cette fois ? Je n’en répondrais pas. J’ai vu tel Sphex, plus soupçonneux que les autres peut-être, ou plus oublieux des menus détails d’architecture, réparer ses oublis, éclaircir ses soupçons en abandonnant le butin cinq, six fois de suite sur la voie pour accourir au terrier, chaque fois un peu retouché, ou simplement visité à l’intérieur. Il est vrai que d’autres marchent droit au but, sans faire même halte de repos. Disons encore que, lorsque l’Hyménoptère revient au logis pour le perfectionner, il ne manque pas de donner, de loin et de temps en temps, un coup d’œil à l’Éphippigère laissée en chemin, pour s’informer si nul n’y touche. Ce prudent examen rappelle celui du