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sa hutte ; pourvu de routes commodes, il se groupe en cités populeuses ; servi par les voies ferrées qui suppriment pour ainsi dire la distance, il s’assemble en d’immenses ruches humaines ayant nom Londres et Paris.

Le Sphex languedocien est dans des conditions tout opposée. Sa proie à lui est une lourde Éphippigère, pièce unique représentant à elle seule la somme de vivres que les autres ravisseurs amassent en plusieurs voyages, insecte par insecte. Ce que les Cerceris et autres déprédateurs de haut vol accomplissent en divisant le travail, lui le fait en une seule fois. La pesante pièce lui rend impossible l’essor de longue portée ; elle doit être amenée au domicile avec les lenteurs et les fatigues du charroi à pied. Par cela seul l’emplacement du terrier se trouve subordonné aux éventualités de la chasse : la proie d’abord et puis le domicile. Alors plus de rendez-vous en un point d’élection commune, plus de voisinage entre pareils, plus de tribus se stimulant à l’ouvrage par l’exemple mutuel ; mais l’isolement dans les cantons où les hasards du jour ont conduit le Sphex, le travail solitaire et sans entrain, quoique toujours consciencieux. Avant tout, la proie est recherchée, attaquée, rendue immobile. C’est après que le fouisseur s’occupe du terrier. Un endroit favorable est choisi, aussi rapproché que possible du point où gît la victime, afin d’abréger les lenteurs du transport ; et la chambre de la future larve est rapidement creusée pour recevoir aussitôt l’œuf et les victuailles. Tel est le renversement complet de méthode dont témoignent toutes mes observations. J’en rapporterai les principales.

Surpris au milieu de ses fouilles, le Sphex languedocien est toujours seul, tantôt au fond de la niche poudreuse qu’a laissée dans un vieux mur la chute d’une pierre, tantôt dans l’abri sous roche que forme en surplombant une lame de grès, abri recherché du féroce