Page:Fabre - Souvenirs entomologiques, première série, 1916.djvu/144

Cette page n’a pas encore été corrigée

par exemple du Cerceris tuberculé et du Philanthe apivore. Et si la demeure des pères n’est pas assez solide pour résister d’une année à l’autre aux intempéries et se transmettre aux fils, si le fouisseur doit chaque fois entreprendre à nouveaux frais son trou de sonde, du moins l’Hyménoptère trouve des conditions de sécurité plus grandes dans les lieux consacrés par l’expérience de ses devanciers. Il y creuse donc ses galeries, qu’il fait servir chacune de corridor à un groupe de cellules, économisant ainsi sur la somme de travail à dépenser pour la ponte entière.

De cette manière se forment, non de véritables sociétés puisqu’il n’y a pas ici concert d’efforts dans un but commun, du moins des agglomérations où la vue de ses pareils, ses voisins, réchauffe sans doute le travail individuel. On remarque, en effet, entre ces petites tribus, issues de même souche, et les fouisseurs livrés solitaires à leur ouvrage, une différence d’activité qui rappelle l’émulation d’un chantier populeux et la nonchalance des travailleurs abandonnés aux ennuis de l’isolement. Pour la bête comme pour l’homme, l’action est contagieuse ; elle s’exalte par son propre exemple.

Concluons : de poids modéré pour le ravisseur, la proie rend possible le transport au vol, à grande distance. L’Hyménoptère dispose alors à sa guise de l’emplacement pour ses terriers. Il adopte de préférence les lieux où il est né, il fait servir chaque couloir de corridor commun donnant accès dans plusieurs cellules. De ce rendez-vous sur l’emplacement natal résulte une agglomération, un voisinage entre pareils, source d’émulation pour le travail. Ce premier pas vers la vie est la conséquence des voyages faciles. Et n’est-ce pas ainsi, permettons-nous cette comparaison, que les choses se passent chez l’homme ? Réduit à des sentiers peu praticables, l’homme bâtit isolément