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dépouillement. À l’état de moignon, elles sont plissées dans le sens de leur longueur et très-contractées. Peu de temps avant leur apparition normale, on peut facilement les extraire de leurs fourreaux ; mais alors elles ne s’étalent pas et restent toujours crispées. Au contraire, quand le grand lambeau dont leurs fourreaux font partie est refoulé en arrière par les mouvements de l’abdomen, on voit les ailes sortir peu à peu des étuis, prendre immédiatement, à mesure qu’elles deviennent libres, une étendue démesurée par rapport à l’étroite prison d’où elles émergent. Elles sont alors le siège d’un afflux abondant de liquides vitaux qui les gonflent, les étalent, et doivent par la turgescence qu’ils provoquent, être la principale cause de leur sortie des étuis. Récemment étalées, les ailes sont lourdes, pleines de sucs et d’un jaune paille très-clair. Si l’afflux des liquides se fait d’une manière irrégulière, on voit alors le bout de l’aile appesanti par une gouttelette jaune enchâssée entre les deux feuillets.

Après s’être dépouillé du fourreau de l’abdomen, qui entraîne avec lui les étuis des ailes, le Sphex retombe dans l’immobilité pour trois jours environ. Dans cet intervalle, les ailes prennent leur coloration normale, les tarses se colorent, et les pièces de la bouche, d’abord étalées, se rangent dans la position voulue. Après vingt-quatre jours passés à l’état de nymphe, l’insecte est parvenu à l’état parfait. Il déchire le cocon qui le retient captif, s’ouvre un passage à travers le sable, et apparaît un beau matin, sans en être ébloui, à la lumière qui lui est encore inconnue. Inondé de soleil, le Sphex se brosse les antennes et les ailes, passe et repasse les pattes sur l’abdomen, se lave les yeux avec les tarses antérieurs humectés de salive, comme le font les chats ; et, la toilette finie, il s’envole joyeux : il a deux mois à vivre.