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animaux articulés sont, dans une certaine limite, indépendants les uns des autres dans leur action ; de telle sorte que la lésion de l’un d’eux n’entraîne, immédiatement du moins, que la paralysie du segment correspondant ; et ceci est d’autant plus exact que les divers ganglions sont plus séparés, plus distants l’un de l’autre. S’ils sont, au contraire, soudés ensemble, la lésion de ce centre commun amène la paralysie de tous les segments où se distribuent ses ramifications. C’est le cas qui se présente chez les Buprestes et les Charançons, que les Cerceris paralysent d’un seul coup d’aiguillon dirigé vers la masse commune des centres nerveux du thorax. Mais ouvrons un Grillon. Qu’y trouvons-nous pour animer les trois paires de pattes ? On y trouve ce que le Sphex savait fort bien avant les anatomistes : trois centres nerveux largement distants l’un de l’autre. De là, la sublime logique de ces coups d’aiguillon réitérés à trois reprises. Science superbe, humiliez-vous !

Non plus que les Charançons atteints par le dard des Cerceris, les Grillons sacrifiés par le Sphex à ailes jaunes ne sont réellement morts, malgré des apparences qui peuvent en imposer. La flexibilité des téguments des victimes peut ici, en traduisant fidèlement les moindres mouvements internes, dispenser des moyens artificiels que j’ai employés pour constater la présence d’un reste de vie dans les Cléones du Cerceris tuberculé. En effet, si l’on observe assidûment un Grillon étendu sur le dos, une semaine, quinze jours même et davantage après le meurtre, on voit, à de longs intervalles, l’abdomen exécuter de profondes pulsations. Assez souvent on peut constater encore quelques frémissements dans les palpes, et des mouvements très-prononcés de la part des antennes ainsi que des filets abdominaux, qui s’écartent en divergeant, puis se rapprochent tout à coup. En tenant les Grillons