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RÉCITS DE L’ONCLE PAUL

leur fournit l’habituelle nourriture ; mais l’insecte n’est pas tellement dédaigné que la plupart d’entre eux n’en fassent ample consommation lorsqu’il abonde et se trouve de capture facile. S’ils n’ont pas la patience de rechercher la vermine dans ses plus secrets réduits avec le soin minutieux qu’y mettent les becs-fins, ils profitent du moins de celle qu’une bonne fortune amène à leur portée. Pouvoir assaisonner la graine de quelques vermisseaux est le plus souvent pour eux excellente aubaine. Et puis la graine préférée peut faire défaut dans le canton ; le chardonneret n’a pas toujours des semences de chardon, et la linotte des semences de lin ; que faire alors, si ce n’est prendre patience en mangeant des insectes ?

Enfin, il y a mieux. Dans leur jeune âge, alors que, faibles et sans plumes, ils reçoivent la becquée de leurs parents, beaucoup de granivores sont alimentés avec des insectes. La raison en saute aux yeux. On comprend tout de suite que le jabot délicat d’un oisillon récemment sorti de la coque de l’œuf, n’est pas de force à digérer des semences maigres et coriaces. Il lui faut quelque chose de plus substantiel, de plus nutritif sous un moindre volume, de plus tendre surtout, comme la marmelade de vermisseaux préparée à point dans le bec de la mère. Un peu plus tard, au premier poil follet, viendront les petites chenilles molles servies entières, puis les insectes, qui, plus consistants, prépareront l’estomac à la digestion laborieuse de la graine. Je prends au hasard quel ques exemples.

Le pinson, le gai pinson, est un granivore bien avéré, amateur du millet et du chènevis. Or, que donne-t-il à ses petits encore au nid ? Il leur sert des chenilles à peau rase, des larves tendres, des insectes choisis parmi les plus faciles à digérer. Je peux en dire autant du verdier, à plumage indécis entre le vert et le jaune ; du bouvreuil, à poitrine et ventre rouges ; des divers bruants, qui viennent l’hiver, en troupes, becqueter autour de nos meules de paille. Ces derniers, cependant, sont voués, plus peut-être encore que les autres, au régime de la graine, puisqu’ils ont à l’intérieur du bec, à la mandibule supérieure, un tubercule dur expressément pour l’écraser.

Je pourrais multiplier ces exemples, mais je préfère m’arrêter un moment sur un oiseau plus connu de vous, sur le