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STRUCTURE DE LA TIGE MONOCOTYLÉDONÉE

puis un autre, un centième, un millième, tant qu’il y a de matière. Alors elle assemble ces fils côte à côte sous forme de colonne ; elle les agglutine en interposant la masse des cellules restée disponible. Ce travail fait, le tronc de chêne se trouve transformé en tige de palmier.

Dans cette transformation y aurait-il décadence ou progrès ? — Il y aurait décadence : la tige dicotylédonée, si correcte, si géométrique, avec ses rayons médullaires tirés au cordeau, ses zones concentriques tracées au compas, ses assises corticales et ligneuses où la cellule, la fibre et le vaisseau sont méthodiquement empilés, est certes supérieure en organisation à la tige monocotylédonée, où tout est brouillé, confondu. Cette infériorité des végétaux à un seul cotylédon, des palmiers en particulier, compte au nombre de ses causes la marche progressive de la création à travers les temps. Une puissance mystérieuse, mandataire des éternels desseins de Dieu, achemine les êtres, avec une lenteur que les siècles accumulés mesurent, vers une organisation plus parfaite. Les plantes des anciens âges furent, nous dit la géologie, des algues glaireuses dans les eaux, des croûtes de lichens sur le roc ; et tout à peu près se bornait là. La vie en était à ses premiers essais ; elle groupait la cellule des plantes rudimentaires avant d’échafauder la fibre et le vaisseau de l’arbre. Une longue période s’écoula et apparurent les races princières des acotylédonées, les prêles gigantesques, les fougères en arbre. Puis, comme préparation aux végétaux qui savent donner des cotylédons à leurs graines, vinrent les conifères, inhabiles encore à façonner le vaisseau. Après les conifères, des monocotylédonées apparurent, et au premier rang les palmiers. En dernier lieu vinrent les dicotylédonées, des ormes, des saules, des érables, et tous les végétaux de l’ordre supérieur.

Il fut un temps où ce coin de terre qui porte aujourd’hui le beau nom de France était éventré par trois bras de mer occupant à peu près les bassins actuels de la Garonne, de la Seine et du Rhône. Entre ces larges golfes,