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LA PLANTE

travail. Il refoule et chasse sans retour les deux couches extérieures et revêt lui-même la tige d’un tissu grossier de fibres. Tel est le cas de la vigne, qui tous les ans renouvelle son écorce avec un feuillet de liber et rejette l’ancienne enveloppe sous forme de loques filamenteuses. Chez d’autres, le chêne et le tilleul par exemple, le liber et l’enveloppe cellulaire prennent part à la fois à la confection de l’écorce. Le premier, avec ses paquets de fibres, fournit la chaîne du tissu ; la seconde, avec ses assises de cellules, en fournit la trame. De leur travail commun résulte une enveloppe complexe, dont les parties hors d’usage se détachent du tronc en grossières écailles de cellules et de fibres associées.

Des diverses zones de l’écorce, c’est en général l’enveloppe cellulaire qui déploie le plus d’activité, sinon dans ses assises externes, desséchées et converties en fourreau grossier, du moins dans ses assises internes, toujours pénétrées de sucs. La séve en imbibe largement le tissu spongieux ; les rameaux y envoient les préparations ébauchées dans les feuilles pour y subir un dernier travail et se transformer en substances variées. C’est, avec les feuilles, le grand laboratoire de l’arbre, l’usine végétale où les matériaux affluent pour en ressortir avec des propriétés nouvelles. Là se fabriquent et se tiennent en dépôt les drogueries de la plante, c’est-à-dire des substances particulières, variant d’une espèce à l’autre, et douées de propriétés énergiques qui les font rechercher par la médecine, les arts, l’industrie. C’est là, pour se borner à quelques exemples, que le cannellier élabore l’arôme de son écorce, que le quinquina prépare la quinine, un des médicaments les plus précieux, que le chêne fait son tannin, substance acerbe qui sert aux tanneurs pour rendre les peaux incorruptibles et les convertir en cuir.

La préparation de ces drogueries nécessite un outillage spécial, qui consiste en canaux d’une forme particulière, nommés vaisseaux laticifères. Ils se trouvent au sein de l’écorce, à la jonction, de l’enveloppe cellulaire et du liber.