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FLEURS ET INSECTES

passage libre. Sa couleur est d’un rouge violet uniforme, mais tout au milieu de la lèvre inférieure se trouve une tache d’un jaune très-vif. Or surveillons un bourdon tandis qu’il butine sur un muflier, nous le verrons toujours s’abattre sur la tache jaune et jamais ailleurs. Forcée par le poids de l’insecte, la lèvre s’abaisse et la gorge de la corolle bâille ; l’insecte entre, brosse en passant les anthères de son dos velu, se poudre de pollen, lèche le nectar et va sur d’autres fleurs distribuer, à son insu, la poussière staminale de sa toison.

La fleur de l’iris est encore plus remarquable. Son périanthe comprend six pièces, trois étalées en dehors et courbées en arc, trois relevées et se rassemblant dans le haut en un dôme. Ces dernières sont d’un bleu violet uniforme ; les autres ont, au milieu, une large bande hérissée de papilles et semblable à un grossier velours jaune. Ces bandes, qui par leur teinte safranée tranchent vivement sur le fond violet du reste de la fleur, sont les points-voyants qui mènent aux étamines, invisibles de l’extérieur et difficiles à trouver pour un œil inexpérimenté. Au centre de la fleur sont trois larges lames violettes, ayant toute l’apparence de pétales ; mais l’apparence est trompeuse car ces lames sont en réalité les styles du pistil. Chacune d’elles se courbe en une voûte et vient s’appliquer contre un pétale à bande jaune, de manière que les deux pièces forment, par leur assemblage, une chambre close. Dans chaque chambre est placée une étamine, dont l’anthère s’applique étroitement contre la voûte, et dont les deux loges, par une exception peu commune, mais ici nécessaire, s’ouvrent par la face extérieure au lieu de s’ouvrir, suivant la règle générale, par la face intérieure. Enfin, à l’entrée même de la chambre, la lame pétaloïde du style se double d’un étroit rebord membraneux. Ce rebord, c’est le stigmate, c’est le point où le pollen doit parvenir.

Complétez par la vue de la fleur elle-même ce que la parole est impuissante à rendre et vous verrez que, sans