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LE POLLEN

tiges très-courtes, qui les maintiennent tout au fond. Ici la difficulté paraît insurmontable ; elle est cependant levée, et d’une admirable manière. Encore en bouton, les étamines protégées par le périanthe étroitement fermé, ces fleurs rompent d’elles-mêmes leur liaison avec la plante, se détachent spontanément et montent à la surface, où elles flottent parmi les fleurs à pistil. Alors elles ouvrent leur périanthe et livrent leur pollen au vent et aux insectes, qui le déposent sur les fleurs pistillées. Enfin celles-ci resserrent leur spirale et redescendent au fond de l’eau, pour y mûrir en repos leurs ovaires.

Le mécanisme pour élever les fleurs au-dessus de l’eau n’est pas moins remarquable
Fig. 155.

A, fragment d’Utriculaire ; B, un utricule isolé.
dans les utriculaires, plantes submergées de nos fossés, de nos étangs. Leurs feuilles, découpées en très-fines lanières, portent de nombreux sachets globuleux ou délicates petites outres, qui ont valu son nom à la plante. Ces sachets, ces utricules comme on les appelle, ont l’orifice muni d’une espèce de soupape ou de couvercle mobile. Leur contenu consiste d’abord en une mucosité plus pesante que l’eau. Retenue par ce lest, la plante se maintient au fond ; mais quand la floraison approche, une bulle d’air transpire au fond des utricules et chasse la mucosité, qui s’écoule par l’orifice en forçant la soupape. Ainsi allégée par une foule de vessies natatoires, la plante lentement se soulève et vient à l’air épanouir ses fleurs. Puis, lorsque les fruits sont près de leur maturité, les utricules remplacent leur contenu aérien par de la mucosité, qui alourdit la plante et la fait redescendre au fond, où les graines doivent achever de mûrir, se disséminer et germer.