Page:Fabre - La Plante (1876).djvu/239

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
229
DÉCOMPOSITION DE L’ACIDE CARBONIQUE

flacon d’acide carbonique et prendre la place du gaz disparu ; on la voit descendre, au contraire, dans le flacon de la plante, remplacée qu’elle est par l’oxygène dégagé. Si l’expérience est bien conduite, tout l’acide carbonique du premier flacon disparaît, et il s’amasse dans celui de la plante un volume à peu près équivalent d’oxygène.

Ces deux manières d’opérer s’écartent beaucoup de l’état naturel des choses : au lieu d’expérimenter sur des plantes entières, tenant au sol par leurs racines et déployant leur feuillage dans l’air, on opère sur des fragments de plante, sur des rameaux, qui n’ont plus de rapport avec la terre et sont plongés dans l’eau, milieu étranger aux végétaux aériens. Les résultats obtenus dans ces conditions artificielles sont-ils réellement applicables à la végétation normale ? Les recherches entreprises par de récents observateurs ne laissent aucun doute à ce sujet. La première en date et la plus célèbre des expériences faites dans des conditions naturelles est celle de M. Boussingault sur la vigne.

L’illustre chimiste introduisit dans un grand ballon de verre incolore un rameau de vigne en pleine végétation. Le rameau adhérait à la tige mère et portait une vingtaine de feuilles. Le ballon était plein d’air ordinaire, se renouvelant avec une vitesse modérée au moyen d’un appareil aspirateur. L’air atmosphérique, ne l’oubliez pas, contient toujours une certaine proportion de gaz carbonique, dont je vous ai exposé plus haut les principales sources. Eh bien ! l’analyse constatait dans l’air sortant du ballon, après avoir circulé entre les feuilles du rameau de vigne, une proportion d’acide carbonique trois fois moindre que dans l’air y entrant. L’acide carbonique disparu était remplacé par un volume à peu près égal d’oxygène. Il suffisait donc d’un passage même assez rapide sur les feuilles exposées au soleil, pour enlever à l’air atmosphérique les trois quarts de son acide carbonique, décomposer le gaz et lui substituer pareil volume d’oxygène.