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LA PLANTE

à oignon, donnent de magnifiques fleurs, souvent d’une culture on ne peut plus facile. De ce nombre est la jacinthe. Voici un oignon de jacinthe ouvert. Vous y reconnaissez les parties constituantes d’un bulbe : une courte tige ou plateau émettant des racines et des écailles charnues engaînées l’une dans l’autre. Du cœur des écailles montent déjà des feuilles ordinaires, avec une grappe de fleurs en bouton. On applique aux oignons de jacinthe la culture ordinaire, c’est-à-dire qu’on les met en terre ; et alors ils fleurissent au printemps. Mais on peut aussi les cultiver sur la cheminée et les faire fleurir en hiver. On met un de ces oignons sur le goulot d’une carafe pleine d’eau, ou bien dans un petit vase rempli de mousse qu’on a soin de maintenir humide. Sans plus, le bulbe végète, excité par la chaleur de l’appartement. Il émet de fines racines blanches, qui plongent dans l’eau de la carafe ou dans la mousse humide ; il déploie ses feuilles et enfin épanouit sa belle grappe de fleurs. Or n’allez pas croire qu’un peu d’eau claire ait, à elle seule, réalisé ce petit prodige d’une plante délicate en floraison au milieu des rigueurs de l’hiver. Le bulbe porte avec lui sa nourriture ; stimulé par la chaleur de l’appartement, il a fleuri avant l’heure, nourri de sa propre substance.

Il y a des bourgeons appelés aux périls d’une existence indépendante et qui, avant de se séparer de la plante mère, n’emmagasinent point des vivres, n’épaississent point leurs écailles ; mais alors la racine et le rameau, tantôt l’un tantôt l’autre suivant l’espèce végétale, sont chargés de l’approvisionnement. En premier lieu, considérons le rameau.

Lorsqu’il est destiné à l’alimentation future des bourgeons qu’il porte, le rameau, au lieu de venir à l’air où il se couvrirait de feuillage et de fleurs, reste sous terre, où rien ne le distrait de son travail. Là, sordidement vêtu de pauvres écailles brunes, derniers vestiges des feuilles auxquelles il a renoncé, opiniâtrement il amasse,