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LES BOURGEONS

temps, l’allongement rapide, sous l’influence d’une douce température, porte les bourgeons à une trop grande élévation au-dessus du sol, pour qu’ils puissent s’enraciner. La tige reste alors unique. Dans le premier cas, d’un grain de blé semé s’élève une touffe de chaumes produisant autant d’épis ; dans le second cas, la récolte est réduite à son expression la plus simple : par grain, une seule tige, un seul épi. C’est donc un résultat d’une haute importance que ce développement des bourgeons inférieurs des céréales. Pour l’obtenir, ou, comme on dit en agriculture, pour faire taller le blé, il faut que les bourgeons, du moins les plus inférieurs, soient en contact avec la terre, qui provoque l’émission des racines adventives. À cet effet, peu de temps après la germination, on passe sur le champ ensemencé un rouleau de bois qui, sans meurtrir les jeunes plantes, les enterre plus profondément.

Les bourgeons fortuits, ceux qui naissent en des points indéterminés pour réparer les dommages dans la plante en péril, les bourgeons adventifs enfin, se prêtent pareillement à de précieuses applications. On met en terre, je suppose, de jeunes plants d’arbres convenablement espacés. S’ils sont ensuite abandonnés à eux-mêmes, ces plants s’allongent chacun en un tronc unique, et le bois obtenu dans ces conditions prend le nom de futaie. Mais il peut être avantageux de remplacer ce tronc unique par un groupe de plusieurs tiges. Alors on recèpe la plantation, c’est-à-dire que l’on coupe les arbres au niveau du sol. Sur le bord de la grande plaie résultant de cette amputation, apparaissent des bourgeons adventifs, qui s’allongent en autant de tiges ; et chaque pied, qui fût devenu un tronc d’arbre unique, est transformé en souche, d’où partent de nombreuses ramifications, toutes de même âge et de même force. Le bois prend alors le nom de taillis. Lorsque les ramifications ont acquis la grosseur que l’on désire, un nouveau recépage les abat et provoque des pousses plus nombreuses encore en multipliant le nombre des blessures. C’est ainsi qu’on parvient à faire produire à