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LA PLANTE

la vigueur décroît rapidement du sommet à la base du rameau : ceux d’en haut sont puissants, ceux d’en bas sont chétifs. Les bourgeons des feuilles les plus inférieures grossissent à peine, et le plus souvent même périssent sans parvenir à se développer. Dans certains cas cependant, par exemple pour maintenir le branchage des arbres fruitiers dans d’étroites limites et favoriser ainsi la production des fruits aux dépens de la production du bois, il est avantageux pour nous que ces bourgeons inférieurs se développent de préférence aux bourgeons supérieurs. On arrive à ce résultat par la taille. Le rameau est coupé tout près de son point d’attache, de manière que le tronçon restant conserve deux ou trois bourgeons au plus. Désormais toute la vigueur de végétation se porte sur les chétifs survivants, qui, sans l’amputation, auraient péri affamés par la concurrence des bourgeons supérieurs ; les matériaux alimentaires puisés par les racines profitent à eux seuls, au lieu d’être répartis, par rations fort inégales, à toute la lignée du rameau. Rappelés à la vie par le sécateur qui a supprimé leurs concurrents, les deux ou trois épargnés s’éveillent donc de leur somnolence maladive ; ils prennent force, se gonflent, grossissent et finalement deviennent de vigoureuses pousses productives.

Le chaume du blé porte à l’aisselle de ses feuilles inférieures des bourgeons qui, suivant les circonstances, périssent au détriment de la récolte, ou se développent en multipliant le nombre des épis. Supposons d’abord le blé semé en automne. Dans cette saison froide et pluvieuse, la végétation est lente, la tige s’allonge peu et les divers bourgeons restent, très-rapprochés l’un de l’autre, à peu près au niveau du sol. Favorisés par le voisinage de la terre humide, ces bourgeons émettent des racines adventives, qui les alimentent directement et leur procurent l’abondance que la racine ordinaire, livrée à elle seule, n’aurait pu leur donner. Ainsi stimulés par la nourriture, ils se développent en autant de chaumes terminés plus tard chacun par un épi. Mais si le blé est semé au prin-