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FORMES DE LA TIGE

tantôt une colonne à profondes cannelures longitudinales, tantôt une sphère relevée de grosses côtes saillantes disposées en méridiens, tantôt un échafaudage de pièces aplaties ou de raquettes articulées l’une sur l’autre. La première forme appartient aux cierges, la seconde aux mamillaires, la troisième aux opontias, dont l’un, le nopal, nourrit, sur ses raquettes, la cochenille ou l’insecte qui nous donne le carmin ; et dont l’autre, naturalisé en Algérie, forme d’impénétrables massifs chargés du fruit aqueux et sucré vulgairement connu sous le nom de figue de Barbarie. Le tissu gonflé de suc des tiges des cactées est, pendant la saison d’excessive sécheresse, la seule source d’eau dans les steppes de l’Amérique méridionale. Enveloppés d’épais nuages de poussière, raconte Humboldt, tourmentés par la faim et une soif dévorante, les chevaux et les bestiaux errent dans le désert. Ceux-ci font entendre de sourds mugissements ; ceux-là, le cou tendu, les naseaux au vent, cherchent à découvrir, par la moiteur du souffle, le voisinage d’une flaque d’eau non entièrement évaporée. Mieux avisé et plus astucieux, le mulet cherche, par un autre moyen, à étancher sa soif. Une plante de forme arrondie et à côtes nombreuses, le mélocactus, contient, sous son enveloppe hérissée de piquants, une moelle très-aqueuse. Avec ses pieds de devant, le mulet écarte les piquants, approche ses lèvres avec précaution, et se hasarde à boire le suc rafraîchissant. Mais cette manière de se désaltérer à une source vive, végétale, n’est pas toujours sans péril : bien souvent on voit de ces animaux dont le sabot a été estropié par les terribles armes du cactus.