Page:Fabre, La bête du Gévaudan, Floury, 1930.djvu/94

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

les neuf heures, la Bête avoit voulu attaquer une femme et une fille, mais que s’étant bien défendues avec la baïonnette, elle les avoit quittées faisant route vers Nozeyrolles, en Auvergne.

« Nous y fûmes et nous nous informâmes si on l’y avoit vue. On nous dit que non. Je demandois au Prieur quels étaient les bois les plus fourrés dans ce canton. Il me répondit qu’il y en avait de très forts de l’autre côté appartenant à M. Dupont de la Grange et qu’en tirant encore plus loin dans l’Auvergne, on trouvait ceux de M. d’Apchier qui y joignoient.

« Nous y fûmes et ayant grimpé la montagne, je postois les tireurs sur la crête et envoyois les chiens par dessous le bois en cas de besoin excepté un limier que je lâchois dans ces bois vers le milieu. Il en eut connaissance, la rapprocha très bien et lui fit passer ces bois jusqu’à la verrerie de M. de la Vedrine, gagnat vers ceux d’Apchier, où un orage nous prit et la nuit approchant nous l’arrêtâmes et fûmes coucher au village d’Auvert, où nous couchâmes tous dans la bergerie, et ne trouvâmes ni pain, ni paille. Dès la pointe du jour, je renvoyois en quête dans les bois de M. d’Apchier jusqu’à la Pause et dans ceux de Colanic proche l’abbaye de Pébrac et le Bois Noir, où on n’eut aucune connaissance.

« Nous rabattîmes sur les bois de Julianges, de Paulhac et de Saint-Privat-du-Fau, sans autre succès. Pendant ce temps, on vient avertir au Malzieu, sur les neuf heures du matin, que la Bête avoit paru dans les bois de Serverette et aux gorges de Prunières. Une personne, que j’y avais laissée pour avoir soin d’un chien malade, y fut avec. Il trouva le Vicaire qui avoit fait entourer ces bois, mais dans la battue il ne sortit rien. Et il n’a pas même été vérifié que ce fût la Bête. »


M. l’abbé Peytavin, curé de Saint-Julien-du-Tournel prétendait prouver péremptoirement que cette Bête n’était qu’un ou plusieurs loups carnassiers, et comme preuve il apportait la liste des personnes dévorées par les loups dans sa paroisse, surtout au village de Serviès.