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certain âge qui a le haut de la tête, la joue, et une oreille emportée : on croit qu’elle n’en reviendra pas. L’autre, une jeune fille, a le bras mangé. Elle tue tout à fait, en coupant le col net et prenant toujours par derrière ou de côté, quand on n’est point secouru.

« Dimanche dernier, une fille allant à la messe, elle lui sauta sur le corps, l’abattit et l’aurait dévorée, si elle n’avait pas été aussitôt secourue par un homme et des mâtins. Enfin, tous les jours quelques nouvelles découvertes. Mais comme il y a beaucoup de loups, peut-être leur donne-t-on le nom de Bête. Nous allons nous fixer à Saint-Chély et à la Garde, où l’on a remarqué qu’elle passe souvent pour traverser d’Auvergne dans le Gévaudan.

« Cette bête n’est nullement facile à avoir. Enfin, je ne perdrai courage qu’à la dernière extrémité. Nos chiens ne sont pas encore venus et ne sont pas prêts d’arriver. Nous avons été bien reçus partout. Nous dînons aujourd’hui chez l’Évêque.

« Signé : Denneval[1]. »


Maintenant que nos chasseurs étaient en face les uns des autres, qu’allait-il arriver ? Chasseraient-ils chacun de leur côté, ou bien réuniraient-ils leurs efforts pour tomber d’un commun accord sur leur ennemi ?

Il était convenu qu’ils s’aideraient mutuellement, mais bientôt la rivalité éclata, sourde d’abord, puis évidente et nullement dissimulée.

Les dragons faisaient toujours des battues, et cela déplaisait à M. Denneval qui craignait qu’on ne tuât la Bête sans lui, et par suite, qu’on ne lui enlevât la gloire et la récompense qu’il s’était promises.

    hardie comme un dragon, et qui eut le courage de lutter contre la Bête dès qu’elle lui sauta dessus. L’animal lui porta un coup de griffe à l’oreille gauche et la lui détacha des muscles, la plaie continua jusqu’au bas du menton. Il lui en fit une autre au côté droit du nez, et lui en emporta la pointe jusqu’aux os carrés, avec la moitié de la lèvre supérieure. La fille prit la Bête par la patte, et, si elle avait eu un prompt secours, on croit qu’on l’aurait prise. » (Pourcher, p. 299 et suiv. Biblioth. nat. Lettre écrite de St-Flour).

  1. Biblioth. nat. Pourcher, p. 247 et suiv.