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tiques et leur remit de l’argent pour distribuer aux pauvres de leurs paroisses ; il en distribua lui-même à ceux qui se trouvaient dans l’endroit.

Il n’était pas hors de propos d’invoquer l’assistance du ciel : la condition des habitants devenait si pénible, et les calamités semblaient si tristement se conjurer pour leur rendre l’existence pesante et douloureuse !


« Il fait ici un temps déplorable depuis trois jours pour les biens de la terre, les blés qui sont presque tous sur pied ou à terre pourrissent sans pouvoir les serrer[1]. »


Les semailles, à cause des chasses continues, avaient été faites d’une manière insuffisante, le peu que l’on avait semé ne pouvant être levé d’une façon satisfaisante, on comprend facilement quelle misère devait peser sur ces populations appauvries qui n’avaient pas d’autres moyens de subsistance.


« La misère est si grande, ici, que presque tous les habitants manquent de pain, de sorte qu’ils sont forcés de se rendre aux battues en tombant d’inanission, faute d’avoir mangé, ce qui oblige même ceux qui ont quelque peu de bled de les faire moudre tous verts, ce qui m’engage à vous représenter combien nous souffrons de voir sous nos yeux, comme partout où nous allons, une si affreuse misère ; elle a tellement touché hier M. de Lafont, qu’il a donné au rendez-vous, dix-huit livres aux trois paroisses du Gévaudan.

« … Mon fils me mande de la Cour, que par la protection que vous avez bien voulu accorder à notre mémoire, qui a été porté au conseil, il avoit été résolu qu’il seroit écrit à S. Altesse Mgr le duc de Penthièvre pour avoir le sieur Chabeau, un limier et trois chiens courants pour loup, ainsi qu’à M. le Marquis de Montmorin pour avoir Dorade et deux chiens aboyeurs. Qu’il ne seroit pas écrit à M. de Champigny, mais que pour remplacer les chiens qui lui auroient été demandés, il nous sera envoyé les limiers, chiens courants, lévriers et mâtins d’équipage

  1. Lettre de M. Antoine à l’Intendant.