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« Par les procès-verbaux signés de tous nos gardes et de moy sur les trois carnages humains qui se sont faits icy, nous reconnaissons être faits par des loups, sçavoir, celui de Broussolles, celui d’Auvert, et celui d’avant hier à la paroisse de Cervières (Servières), où un petit garçon âgé de huit à neuf ans a été enlevé à la vue de son père, de sa mère et de sa sœur, et porté à plus de cinq cens pas, et un faucheur qui étoit près de là a obligé cette Bête de s’enfuir, ayant laissé le petit garçon sans connaissance, ayant eu deux crocs au-dessous du menton, la joue gauche ouverte, trois ou quatre dentées au-dessus de la tête, à l’épaule et à la main aussi. Cet enfant ayant été pansé par un chirurgien de Saugues, l’on espère qu’il n’en mourra pas…

« Nous sommes dérangés à tout moment, ayant commandé demain une grande battue pour fouiller la forest noire et bois d’Auvert, où par le rapport des valets de limiers les loups y ont leurs louveteaux.

« Au Besset, ce 29 juillet.

« Antoine[1]. »


En cette période de la chaude saison, où les récoltes couvraient le sol, où les foins qui séchaient et les moissons qui se doraient ne laissaient point chômer les bras valides, les opérations de M. Antoine étaient comme paralysées, et ne pouvaient guère se faire que le dimanche.

Aux premières journées d’août, M. le comte de Tournon était venu le rejoindre avec une meute de vingt-cinq chiens, deux piqueurs et deux valets, et de concert ils tentaient de trouver la piste de la Bête, pour lui donner la chasse, dans le rayon circonscrit dont elle semblait ne plus s’écarter :


« J’ai reçu les affiches pour avertir les paroisses d’Auvergne, les batteurs, tireurs et bergers avec leurs chiens pour se joindre aux différents rendez-vous qu’exige la queste continuelle que nous sommes tous les jours obligés de faire pour le détourner, ce qui nous paroit presque impossible, parce qu’il est presque

  1. Archives du Puy-de-Dôme. C. 1733.