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L’étang, plein jusqu’au bord, avait la couleur grise
          Du ciel triste qui s’y mirait ;
Et sur les rocs aigus où son onde se brise,
          Lente, la cascade pleurait.

Et comme elle à pleurer j’aurais trouvé des charmes ;
          Mais l’angoisse qui m’étreignait
Ne pouvait de mes yeux faire jaillir les larmes ;
          Seul dans l’ombre mon cœur saignait.

Quoi ! nul n’apparaîtrait sur ce perron agreste !
          Nul ne viendrait m’y faire accueil !
Des traces de sabots, est-ce tout ce qui reste
          De ma maisonnée au cercueil ?…





Jadis, au moindre appel d’enfant, d’homme ou de bête,
          Le sourire ou les pleurs aux yeux.
Mère et sœurs accouraient, la main ouverte et prête
          À secourir au nom des cieux.

Ou, debout sur ce seuil aujourd’hui solitaire,
          Mon père, de sa forte voix,
Répondait, commandait, gourmandait, faisait taire
          Les vacarmes et les abois ;