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tableau qui représente saint Eloi[1]. Il est au-dessus de l’autel, contre la muraille, sans cadre. Cette chapelle sert auxdits maréchaux, serruriers et muletiers pour le jour de la fête de leur patron, et les bouviers et bergers y font aussi celle de leur patron, qui est saint Pons[2]. On voit contre la muraille, à gauche de l’autel, la figure de saint Pons, et de l’autre côté, celle de saint Lazare[3].

On nous a dit que tous les meubles de ladite chapelle consistaient en une nappe.

Le pavé, qui n’est qu’un jet de plâtre sur des pierres qui sont au-dessous, a besoin d’être raccommodé. Il pleut en un endroit, sur la voute de la chapelle. Elle n’a d’autre jour que celui qui vient par la grille de bois qui est au-devant de ladite chapelle, au milieu de laquelle est la porte de bois. Il y a un avant-toit, avec des murailles à hauteur d’appui des deux côtés, mais le devant est tout ouvert[4]. Les voisins y mettent à couvert, dans le temps de la moisson, des gerbes de blé, des fèves et haricots. On y bat même quelquefois le blé et on remplit ainsi la chapelle de poussière, de sorte que si elle était en état, le linge et les meubles en seraient souvent endommagés. Il faut défendre qu’on mette rien sous cet avant-toit ou avant-chapelle, et faire la même défense pour la plupart des autres chapelles de campagne qui sont disposées de même manière.

[121] Cette chapelle n’est pas fondée. On y dit quelques messes par dévotion, le jour de Saint-Eloi. Les serruriers, maréchaux et muletiers les font dire. De même le jour de Saint-Pons, les bergers et les bouviers y font aussi célébrer[5]. Ces derniers n’ont pas voulu contribuer au paiement du tableau qu’on a fait. Quelques serruriers et maréchaux qui étaient présents à notre visite nous ont demandé permission de faire une quête parmi ceux de leur profession et de leur confrérie, pour pouvoir acheter ce qui est nécessaire pour l’entretien de ladite chapelle.

Nous sommes revenu sur les huit heures du soir et nous avons fait avertir les pénitents blancs que nous nous rendrions, demain à sept heures, dans leur chapelle.

  1. Saint Eloi, patron des forgerons.
  2. on peut donc dire qu’il y a dans cette chapelle deux "confréries de métier", celle des métiers du fer et celle des éleveurs.
  3. Cette mention est tout à fait précieuse. C’est la seule, à ma connaissance, d’un lieu de culte dédié à saint Lazare. Ce culte fait évidemment songer à l’hôpital de Saint-Lazare, destiné à accueillir les lépreux, dont l’existence est attestée dans la seconde moitié du XVIe siècle et dont on ignore l’emplacement. La chapelle Saint-Pons, qui existe toujours, a peut-être été à l’origine la chapelle de cet hôpital. D’autant plus que le pouillé de 1496 dit que la chapelle de Saint-Pons est située à la Foux, c’est à dire dans une direction tout à fait opposée par rapport à la ville. Cette première chapelle de Saint-Dons a du tomber en ruine et la confrérie se sera installée dans la chapelle Saint-Lazare. La lèpre est, au XVIIe siècle, une maladie qui a pratiquement disparu de nos contrées.
  4. Bourchenu nous décrit ici une avant-chapelle chapelle, ou porche couvert précédant la chapelle selon le modèle provençal. La chapelle actuelle n’a plus de porche, soit que celui-ci ait été démoli, soit qu’il ait été ultérieurement fermé et incorporé à la chapelle.
  5. A la réflexion, il est assez surprenant que les muletiers soient associés aux serruriers et aux maréchaux dans le culte de saint Eloi. Certes, ils ont besoin de faire ferrer leurs mules. Mais ils sont étrangers à la métallurgie. On les verrait plutôt associés aux éleveurs dans le culte de saint Pons. Bourchenu avait d’abord écrit" les serruriers et les maréchaux". Il leur a adjoint les muletiers par surcharge.