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l’autre qui doit porter la soutane et le surplis et être toujours au lutrin[1]. Quatre enfants de chœur[2],

Neuf heures ayant sonné, nous nous sommes retiré, accompagné jusqu’à la porte de l’évêché par lesdits sieurs prévôt et chanoines. Nous avons renvoyé au lendemain matin, 4e juillet, la continuation de la visite, pour employer l’après dîner à lire les anciens statuts de l’église et à nous informer plus particulièrement de tout ce qui regarde le temporel de l’église et l’administration de ses revenus[3].

Le sieur prévôt. Ses revenus

[55] Le sieur prévôt a une maison assez grande[4]. Et pour sa prébende, un domaine au terroir de Cagnes. Ce sont des fonds qui valent 200 livres de rente tous les ans. Ils appartenaient au monastère de Saint-Véran, maintenant démoli, aussi bien que la chapelle de Notre-Dame-la-Dorée qui avait été bâtie du temps de Charlemagne, dont les terres ont été unies à la prévôtés[5] Le tiers de la dîme de Groliéres[6], les deux autres tiers servant de prébendes à deux autres chanoines. Ce tiers est affermé 680 livres, mais les charges en lèvent plus de la moitié. Il y a deux vicaires à payer, un secondaire, le prédicateur[7], et pour l’entretien d’un clerc[8] aux deux paroisses de Grolières, pour le luminaire et les ornements. Sa prébende est double et sa distribution[9] aussi.

[56] Il a encore une terre à Coursegoules, de 14 charges d’anone[10], mais il en fait sept de pension, due ensuite de l’aliénation permise pour la rançon du roi François Ier[11]. Le sieur Isnard, son frère, qui a du bien à Coursegoules, a acheté cette pension de ceux qui l’avaient précédemment[12]. Le chapitre lui fait aussi une pension de 7 livres 10 sous argent[13].

Le sacristain. Ses revenus

[57] M. de Sabran, sacristain[14], a une maison dont il tire de loyer 18 livres[15]. Plus une portion de la dîme de Saint-Paul, qui va à la sixième (partie) environ. Le chapitre a le reste. Cette portion rend 300 livres. C’est au quartier de la Gandalet[16]. Une dîme dans les paroisses de Cagnes et de Villeneuve, valant 600 livres, sur quoi il paie 18 livres pour le prédicateur de Cagnes[17],

Le chapitre lui donne quatre panaux et demi d’anone pour les dîmes de Tourréte, de Caille et de Saint-Martin qu’il a abandonnées pour l’entretien de la sacristie, s’étant réservé la nomination à la vicairie de Tourettes et de Caille. Il nomme aussi à celle de Villeneuve[18].

Il a été déclaré dignité par l’évêque Raymond second, en 1319, dit le livre de M. Godeau[19].

L’archidiacre. Ses revenus

[58] M. Decormis, archidiacre, a 6 charges d’anone, 18 charges de vin, 24 écus d’argent que le chapitre lui donne, plus une petite terre de la chapelle de la Croix qui est unie à son bénéfice[20]. Elle vaut environ trois écus. L’archidiacre avait autrefois une prébende le long du Var, dans le Comtat de Nice, vers Aspremont. Il y a maintenant prescription. Les lieux sont difficiles[21]. On n’a jamais pu rétablir ces droits. La ville de Nice lui faisait pension et cense. Il était prébendé aux villages de Venanson et Saint-Martin Lantosque, dans le comté de Nice, duquel lieu de Venanson il est seigneur spirituel et temporel, en qualité de recteur de l’hôpital de Saint-Laurent[22].

Le Théologal. Ses revenus

[59] M. Olive, théologal, a sa prébende à Courmes et à Courmette, et encore à Valette. Il a la dîme dans tous ces endroits. Il en tire 1400 livres. Ces limes furent unies à ce bénéfice en 1462, par Raphaël II, dit Monso.

Il paie la portion congrue au vicaire de Courmes et le service qu’on fait à Valette depuis la Saint-Jean jusqu’à la Croix de septembre, pour lequel il donne 12 écus[23]. Il est obligé aux leçons dans l’église, et à faire prêcher l’avent et les dominicales, comme il est porté par l’arrêt que fit donner M. de Sisteron étant évêque de Vence, en 1678[24]. Il donne ordinairement 6 écus pour les prédications de l’avent. Il a encore à payer ses décimes[25].

  1. Campaniers :. sonneurs de cloche, de campana, la cloche, en provençal comme en latin.
  2. Note d’Oswald Baudot : au total, de l’évêque aux enfants de choeur, le clergé vençois se réduit à 29 personnes. Mais ici Bourchenu donne un effectif théorique qui ne correspond pas à la situation réelle. Certains emplois ont été supprimés ou bien n’ont pas actuellement de titulaires (joueur de serpent, maître de musique). Il y a trois campaniers, dont deux clercs et un laique, et non pas deux (§ 68). On verra plus loin qu’il y a cinq enfants de chœur et non pas quatre (§ 163). Je ne suis pas sûr que le théologal soit un dignitaire du chapitre. Il faut compter le cabiscol, les deux curés, le diacre et le sous-diacre au nombre des bénéficiers.
  3. A partir d’ici la visite proprement dite s’interrompt pour ne reprendre qu’au § 87. Nous avons des notes prises par Mgr Bourchenu dans les archives, notes de caractère historique ne correspondant pas nécessairement avec la réalité.
  4. Cette maison, connue sous le nom de "prévôté", existe toujours. Elle fait l’angle de la place Godeau et de la rue de l’évêché.
  5. L’antique monastère de Saint-Véran à Cagnes sur les bords du Loup est connu par le cartulaire de l’abbaye de Lérins. Les renseignements fournis par Bourchenu sont tirés de ce cartulaire
  6. Gréolières, qui formait alors deux paroisses (Gréolières hautes et Gréolières basses) mais une seule communauté.
  7. Le prédicateur ; le prêtre, étranger à la paroisse, qui vient prêcher le carême, souvent un membre d’un ordre régulier.
  8. Le clerc, très bassement rémunéré, est généralement un jeune homme qui a reçu la prime tonsure et qui se destine à l’état ecclésiastique.
  9. Le chapitre distribue aux chanoines et aux bénéficiers, soit en argent soit en nature, le blé et le vin provenant de la dîme qu’il perçoit. Le prévôt a double part dans cette distribution. On a ici une assez bonne énumération des charges qui pèsent sur les chanoines prébendés. Anciennement les vicaires (desservants titulaires de la paroisse) étaient rémunérés par une part de la dîme. Mais pour leur assurer des revenus décents, ce que nous nommerions un minimum vital, le gouvernement leur a permis de renoncer à cette partie de la dîme et de recevoir en échange une "portion congrue", congrue ayant le sens de convenable. C’est certainement le choix qu’ont fait les vicaires de Gréolières puisque leurs salaires sont entièrement à la charge des trois chanoines prébendés. En effet les charges énumérées ici doivent s’entendre partagées en trois entre les chanoines, comme la dîme.
  10. Anone : froment. On sait que la superficie des terrains est calculée selon la quantité de blé qui serait théoriquement nécessaire pour les ensemencer.
  11. C’est la fameuse terre de Saint-Michel de Leineris, dont la chapelle romane existe encore, au-dessus de Coursegoules. C’est pour le prévôt une sinécure car il n’y fait aucun service. On sait que François Ier fait prisonnier à Pavie (1525) dut payer une rançon à Charles-Quint. Le diocèse de Vence y a donc contribué.
  12. Il y a belle lurette que le prévôt aurait pu racheter le bien de l’église aliéné sous François ter. La moitié du revenu va à son frère et ainsi échappe à l’église sans sortir de sa famille. Ce frère est sans doute le juge seigneurial de Mgr Bourchenu, cf. § 29.
  13. Il s’agit ici du prévôt. Cette pension, dont la cause n’est pas indiquée, augmente sa part aux distributions du chapitre.
  14. Le nom de Sabran est celui d’une famille illustre en Provence.
  15. Tignore où se trouvait la maison du sacristain.
  16. Le Gandalet ou Gaudelet, terroir de Saint-Paul, limitrophe de Villeneuve-Loubet. Le sacristain y perçoit la totalité de la dîme. Il n’y a donc pas de partage proportionnel de la dîme de Saint-Paul que le chapitre perçoit aux terroirs de Saint-Paul, de La Colle et de Roquefort.
  17. Le sacristain est prébendé à Villeneuve. Il perçoit la dîme à Villeneuve et sur une partie du terroir de Cagnes, limitrophe de Villeneuve. C’est la raison pour laquelle il paie à Cagnes une partie du salaire du prédicateur de carême. Il n’a aucune charge à Villeneuve, ce qui montre que le vicaire de ce lieu perçoit de son côté une partie de la dîme et supporte toutes les charges.
  18. Le sacristain était chargé de fournir la sacristie de la cathédrale à ses dépens. Il s’en est déchargé par un accord avec le chapitre, lui abandonnant la dîme qu’il percevait à Tourrettes (sur Loup), à Caille et au prieuré de Saint-Martin-de-la-Pelote (à Tourrettes). Il s’est réservé cependant une certaine quantité de blé (le panal est le huitième d’une charge) et le pouvoir de choisir les prêtres titulaires des trois paroisses de Villeneuve, de Tourrettes et de Caille. Peut-être les chanoines tiraient-ils un profit pécuniaire (simonie) de ce pouvoir de nomination qui revenait à imposer à l’évêque des titulaires de paroisse qu’il n’avait pas choisis.
  19. Référence au pouillé de Mgr Godeau, Archives départementales des ALpes-Maritimes, G 1361. De ce Raymon II, la Gallia Christiana dit seulement qu’il est mort le 16 des calendes d’octobre 1319 et qu’il avait pris possession de son siège la même année.
  20. La chapelle Sainte-Croix, alias Saint-Crépin.
  21. Les lieux sont difficiles : il faut comprendre que les lieux concernés font des difficultés, s’opposent à la reconstitution de cette prébende.
  22. L’hôpital de Saint-Laurent-du-Var.
  23. La Saint-Jean d’été, le 24 juin. L’exaltation de la Sainte-Croix, le 14 septembre.
  24. Cet arrêt est un arrêt du conseil du roi, comme on voit au § 76 ci-dessous. M. de Sisteron est Mgr Thomassin, successeur de Mgr Godeau, évêque de Vence avant d’être transféré à l’évêché de Sisteron. M. Oswald Baudot dit ne pas connaitre cet arrêt, important pour l’histoire du diocèse, sur lequel Mgr Bourchenu revient plusieurs fois.
  25. Décimes ; imposition payée annuellement par le Clergé de France pour satisfaire au "don gratuit" qu’il fait au roi. La prébende de Courmes paraît constituer un simple canonicat et ne pas être rattachée à la théologale.