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suet, un ballet de Lulli un parc à la Lenôtre. Ainsi, heures mêmes où il semble leur échapper, les règles aux exactes et sévères des nombres et des formes exercent encore sur son esprit leur silencieuse domination.

Un des écrivains vivants qui ont parlé le plus dignement de Pascal, contemplant à Port-Royal son masque de mort ou des traits si contraires, ceux « de Condé et de Descartes », sont rassemblés, admire la profondeur de repos qu’ex prime ce visage. « La mort, dit-il, est le lieu de Pascal. Il l’a tant cherchée et poursuivie partout que cette passion trouble son visage d’homme. Mais quand il l’a enfin trouvée, et qu’il ne la craint plus, pour l’avoir vue face à face, quelle paix ineffable respire son ennui… » Le moment unique l’a rasséréné pour jamais et lui a ouvert la route « qui mène a un repos sublime où l’espoir, comme la terreur, où le dédain même a toujours la paix ».

Cet équilibre sans fin au-dessus des passions, où toutes se fondent en une seule, l’amour de Dieu, ce repos sublime, que la vie ne trouble plus mais si désincarné, si détaché de tout lien terrestre, est-il à ce point différent de la divine mort où tout rentre et s’efface qu’ont chantée nos poètes stoïciens ? Ou de ce Nirvana sans désir auquel aspirent, de l’autre côté de la terre, les ascètes sacrés ? Entre les paroles de Pascal à Jésus qui lui parle, et le silence hautain de de Vigny répondant au silence de la divinité, y a-t-il antinomie ou affinité ? Et si je ne craignais d’inquiéter certaines âmes, j’ajouterais qu’entre les effusions du Mémorial et l’Ecce Homo du grand négateur, du surhomme Nietzshéen dont la raison tremble déjà au bord de l’abîme, il existe je ne sais quelle étrange et surprenante parenté verbale. Ainsi le savant, le poète et le saint, confondus en Pascal nous apparaissent comme un sommet dans la suite de grands lyriques qu’a tourmentés inlassablement le mystère de notre destinée et dont le génie, plus fort que leur tourment, nous enseigne, suivant la magnifique ex pression de Renan, « ces vérités qui dominent la mort empêchent de la craindre et la font presque aimer. »