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quelle fierté il revendique, dans le domaine scientifique, les droits exclusifs de l’expérience et de la raison, contre l’autorité soit du pouvoir temporel, soit de la tradition. S’agit-il de l’autorité temporelle ? « Le pouvoir des rois, écrit-il dans sa lettre fameuse à la reine Christine de Suède, n’est qu’une image du pouvoir des esprits sur les esprits qui leur sont inférieurs. Ce dernier empire me paraît même d’un ordre d’autant plus élevé que les esprits sont d’un ordre plus élevé que les corps, et d’autant plus équitable qu’il ne peut être départi et conservé que par le mérite, au lieu que l’autre peut l’être par la naissance et par la fortune. » Et, quant à l’autorité de la tradition, il déclare « réserver pour les mystères de la foi que le Saint-Esprit nous a révélés, cette soumission qui ne demande aucune preuve sensible ou rationnelle ». Si la théologie est immuable, la physique est soumise à un perpétuel progrès. Il faut confondre l’insolence de ces faux sages qui réclament pour Aristote le respect inviolable dû à Dieu seul. Ceux que nous appelons anciens formaient l’enfance de l’humanité ; les connaissances qu’ils nous ont transmises ont servi de degrés aux nôtres. « C’est nous qui sommes les anciens, et si l’antiquité pouvait être un titre de respect, c’est nous, qui serions respectables. Mais non, n’est respectable que la vérité, qui n’est ni jeune ni ancienne mais éternelle. Si quelques anciens ont été grands, c’est par leurs efforts et parce qu’ils ne se sont servis des inventions de leurs prédécesseurs que comme d’instruments pour les dépasser. De quel droit nous interdirait-on de faire de même ? »

Au domaine de la théologie, substituez le domaine de l’inconnaissable, et mainte page célèbre de Pascal de viendrait, ou peu s’en faut, une page d’Auguste Comte, plus dense seulement, plus ramassée, plus émouvante.

L’ardeur et la passion de son tempéramment, transparaissent même à travers la froideur du raisonnement géométrique. Il y a, dans la démarche de son esprit, je ne sais quoi de direct, d’impétueux, de despotique. Son argumentation bouillonne, palpite, s’élance vers le vrai. A quelque sujet qu’il touche, il y marque sa griffe de lion. Toutes