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homme a plus largement que Pascal contribué à la formation de l’âme nationale ?

J’ai d’ailleurs plus d’un exemple personnel de son action.

J’ai eu la bonne fortune d’être, dans les régiments d’artillerie de cette ville, lieutenant, capitaine, chef d’escadron et aussi colonel et combien ai-je connu d’officiers qui jamais ne sont passés devant la maison natale de Pascal, près de la cathédrale, sans lever la tête et saluer des yeux le buste qui orne sa façade !

J’ai maintes fois fait avec eux, à cheval, le tour du domaine de Bien-Assis ; quand nous arrivions le long des murs, nous ralentissions l’allure, comme on fait dans un pèlerinage à l’approche du sanctuaire, et nous parlions de lui et des Perier, et pas seulement, je vous assure, de l’expérience du puy de Dôme, non plus que des différents théorèmes qui, en mathématiques, portent le nom de Pascal.

On croit trop souvent que les militaires se désintéressent des hautes spéculations de l’esprit ; ce sont au contraire des gens fort curieux de toutes choses ; même aux heures les plus sombres de la guerre, il leur arrivait de relire les bons auteurs.

Un jour, en 1918 — c’était à une période fort critique, décisive, même — en revenant tard dans la nuit d’une visite à un Q. G. d’armée, j’allai frapper à la porte de mon chef d’état major pour lui demander si de nouveaux renseignements n’étaient pas arrivés pendant mon absence ; je le trouvai plongé dans la lecture des Pensées de Pascal.

A ce propos, je me souviens d’une curieuse coïncidence : je me rappelle très nettement qu’à la même époque, j’avais moi-même, sur ma table de travail, votre Némésis, mon cher Maître, ce livre étonnant où vous avez prévu les convulsions du communisme.

Nous avions bien d’autres livres ! Dès 1916, Barrés nous avait envoyé son admirable étude sur Les Angoisses de Pascal et nous l’avions tous lu dans mon état major.

Vous voyez que le fond de notre petite bibliothèque de campagne était plutôt sérieux et que nous pouvons nous aussi, nous réclamer de Pascal.