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IV

coup d’œil sur la plantation.


L’esclavage passait pour revêtir, dans l’État de Maryland, sa forme la plus bénigne. Il n’y présentait disait-on, aucune de ces circonstances atroces, habituelles aux territoires du Sud et de l’Ouest. Le voisinage des États libres, l’influence de leur foi, de leur humanité, de leur moralité, tempérait les rigueurs du système. Là où s’exerçait cette influence, une certaine contrainte muselait, jusqu’à un certain point, la férocité des maîtres, des surveillants et des conducteurs. Mais cette influence, loin de s’étendre à tout le Maryland, restait circonscrite. Tels recoins, telles localités écartées, ne recevaient pas un rayon de cette bienfaisante lumière. Protégé par son isolement, enveloppé dans ses ténèbres, l’esclavage pouvait y être dépravé sans vergogne, cruel sans frisson, meurtrier sans risquer la geôle ou l’échafaud.

Les terres du colonel Lloyd, éloignées de tout centre commercial, de toute ville ou même de tout village, se trouvaient dans ces conditions.

Un instituteur, M. Page — Greenfied, Massachussets