Page:Féval - Une pécheresse, volume 1 - 1849.djvu/8

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 4 —

à l’un des principaux emplois de la Monnaie. Possesseur, outre cela d’un gros patrimoine, fruit des libéralités répétées de Napoléon envers le vieux répétiteur ; portant un titre et regardé comme devant arriver au premier rang dans l’administration, il pouvait naturellement prétendre à un parti considérable.

Mais l’amour en décida autrement.

À la fin de 1813, Nadermann, le fameux facteur de harpes, produisit dans le monde artistique une jeune harpiste d’un très-remarquable talent, nommée Robertine Roberts, Anglaise de naissance, et venue à Paris avec sa mère, qui était pauvre et bien malade.

Mistress Roberts ne tarda pas à mourir, laissant sa fille orpheline et absolument seule au monde.

La harpe était alors ce qu’est le piano de nos jours. La mode avait adopté ce bel et gracieux instrument. Les dames en raffolaient et regrettaient seulement de ne plus pouvoir poser sur les pédales, comme cette heureuse Tallien, l’orteil déchaussé de leur pied blanc.

Robertine avait un peu plus de dix-sept ans. Elle était jolie comme elle fut belle plus tard, jolie et fraiche à désespérer les faiseurs de métaphores qui fouillaient le dictionnaire de la Fable et le parterre de leur mémoire, tout émaillé de fleurs académiques,