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On eût dit cela ; mais ces souriants visages de vierge sont sujets à tromper la vue.

En tout cas, sous le rapport sentimental, Florence et Robertine étaient le jour et la nuit. Également belles toutes deux, si ce n’est qu’il y avait en Robertine quelque chose de plus harmonieux et de plus exquis, elles se faisaient plein contraste, dès qu’on voulait épeler sur leurs traits le livre de leur âme.

Non pas qu’il n’y eût en toutes les deux, bien qu’à des degrés différents, noblesse, intelligence et bonté, mais parce que l’une avait souffert déjà ; aimé déjà, craint, désiré, pleuré ; tandis que l’autre arrivait contente au seuil de la vie, et ne voyait que joies et que triomphes dans le lointain rose de son avenir.

Et aussi, parce que la seconde était un cœur mondain, ayant les idées de tous et les désirs qu’on a, tandis que la première, subissant les conditions de sa nature supérieure, exagérait, au contact de sa sensibilité trop grande, jouissances et douleurs, et se lassait, en outre, par une sorte de jalouse pudeur, à refouler en elle tout ce qui voulait s’élancer au dehors ; douleur ou jouissance.

Florence avait été élevée dans l’un des principaux pensionnats de Paris. Elle avait partagé la cette éducation élégante, digne, fière, morale avec faste, un peu roide, un peu guindée et ressemblant trop aux lignes inflexibles de l’architecture du temps, éducation qui créa plus d’une Corinne grotesque,