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hasard avait comme entassés, se représentèrent à son esprit plus confus encore et plus invraisemblables. Il eut grand’peine à récapituler tout ce qui s'était passé, ce qu′il avait vu, ce qu′il avait cru voir, sa course folle à la poursuite d’une inconnue, ses angoisses jalouses, Saint-Roch, le passage, et ce repaire où il s′était pris lui-même au piége.

Armand se demandait si, avant d′entamer cette série d′actions et d′événements, si fort en dehors de son caractère et de sa vie habituelle, il n’y avait point eu en lui quelque chose d’anormal : de la fièvre, de l′ivresse.

Mais non. C’avait été un enchainement de circonstances étranges, impossibles à prévoir sans doute, mais un enchainement serré, logique en quelque sorte, une manière d’échelle dont tous les degrés se tenaient. Une fois le premier pas fait, impossible de se retenir etde ne point glisser jusqu’en bas.

Le premier pas, c′était ce soupçon misérable conçu sans motif ni excuse, et qui l′avait préoccupé au point de lui faire prendre une femme, la première venue, pour sa Robertine.

En somme, Armand ne se plaignait point trop amèrement. Il se sentait coupable et ne marchandait point avec le châtiment. D’ailleurs, entre lui et les fantastiques tortures de sa soirée de la veille, il y avait une douce et radieuse image, l’image de Robertine endormie.

Armand avait vu tant de candeur sereine