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Il ne prenait point garde.

Cependant, au moment où il arrivait à l’angle de la rue des Frondeurs, le choc d’un passant le rejeta sur une femme qui pressait le pas sur le trottoir. Armand, par un instinct de courtoisie, leva les yeux sur elle afin de s’excuser. La dame ne s’était point retournée ; elle courait toujours.

Armand poussa un cri et s’arrêta court. Cette dame, vêtue d’une mante de soie noire, était bien celle qu’il avait suivie depuis la rue Chauchat jusqu’à Saint-Roch. C’était Robertine !

La présence d’esprit fit défaut au baron. Lorsqu’il s’élança enfin sur la trace de la dame, celle-ci était déjà loin. Néanmoins, Armand ne la perdit point de vue. Il l’apercevait se glissant parmi la foule des trottoirs et parvenant à se frayer partout un passage ; puis la foule se mettait entre deux un instant, puis encore la dame se remontrait toujours alerte et pressée.

Elle déboucha sur la place du Palais-Royal. Le temps se trouvant être beau momentanément, la place était pleine de voitures de toutes sortes. La dame ouvrit elle-même de sa petite main gantée le premier fiacre venu, et dit un mot. Le fiacre partit.

Armand arriva trop tard pour se glisser derrière le fiacre. Et puis, peut-être, n’eût-il pas songé à ce moyen héroïque, lequel expose à de nombreux coups de fouet.