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chaîne de sûreté, une bonne âme enfin, qui, selon la sublime locution populaire, ne serait pas capable de faire du mal à un enfant !… »

C’était cela, c’était parfaitement cela. Seulement, à supposer que les gens de province soient ridicules, ce qu’aiment à croire les gens de Paris, M. Chose était à cette règle une vivante exception. Rien en lui ne prêtait à rire. Sa personne, au contraire, attirait par un certain charme de bonhomie tout à fait précieux et particulier.

Au premier aspect, cet-homme était l’incarnation la plus heureuse possible de l’élément bourgeois ; sa rondeur se présentait aimable, son laisser-aller avait une arrière-nuance de retenue décente, le tout recouvert d’un vernis de bienveillance sage et de réel savoir-vivre.

Au second coup d’œil, l’impression ne changeait point, mais elle se modifiait. On découvrait, parmi la bonhomie de M. Chose, une sorte de rayonnement intellectuel, et l’on se demandait si ce provincial n’était point quelqu’une de nos gloires contemporaines, un homme d’État, un inventeur, un poëte…

Peu de gens vont jusqu’au troisième coup d’œil, qui appartient exclusivement aux myopes et aux observateurs effrénés. Ce troisième coup d’œil surprenait justement M. Chose au moment où ce provincial, ayant subi deux regards, se croyait quitte et faisait lui-même ses petites observations.