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seigné que nous sommes sur les événements de notre récit, il nous prend envie parfois de croire que le hasard seul avait conduit ce galant homme dans un repaire de faux monnayeurs. Pour nous persuader le contraire, il ne faut rien moins que l’évidence. C’était un homme de cinquante ans, demi-chauve, membré vigoureusement, habillé de vêtements propres et cossus : habit bleu ouvert, pantalon noir, cravate blanche nouée à la papa. Il avait un bon grand front sans rides, des yeux bleus qui souriaient franchement, des joues pleines, et seulement un tout petit trait de raillerie dans la ride tangente aux coins de sa bouche. Tout cet ensemble était vraiment honnête et faisait plaisir à regarder. Vous eussiez reconnu tout de suite en ce digne monsieur un homme paisible, simple, sincère, d’humeur joyeuse, mais craignant le fracas, ne manquant point d’esprit, oh ! que non ! ayant même plus d’esprit que ceux de vos amis qui veulent en avoir, mais cachant son esprit comme d’autres montrent le leur.

Et vous eussiez dit : « Voici un brave provincial, provincial, car il a des boucles d’oreilles, » et que tout observateur de quelque mérite place les boucles d’oreilles parmi les symptômes les plus désespérés du provincialisme, « un notable de Pontoise ou de Fécamp, un homme qui dispose de onze voix dans son collège, un philosophe normand ou picard, que les filous suivent à la piste, à cause de sa