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ver au fond de son amour de paradoxales subtilités qui dérouteraient le logicien le plus retors.

Robertine aima donc, et admira parce qu’elle aimait. Ce fut tout ; elle ne voulut point épouser.

Pourquoi ? Le bandeau qui était sur sa vue lui cachant ses supériorités morales, tous les avantages se trouvaient du côté du baron. Il était riche de plus de cent mille livres de rente ; il avait une position fort élevée, un avenir magnifique.

Et il aimait assez pour mettre tout cela aux pieds d’une femme qui ne lui offrait rien en échange, rien de positif du moins, rien d’escomptable : ni influence, ni famille, ni fortune !

Qu’était Robertine ? Une de ces créatures qu’on accueille ou qu’on rejette au choix du caprice, une de ces femmes dont nos mœurs étourdies font la position si fausse et si douteuse, à qui le code étroit de nos salons a négligé de garder une petite place dans la hiérarchie mondaine, qui ne sont rien, qui ne tiennent à rien, auxquelles on doit, pour le plaisir qu’elles donnent, non point de l’estime et de l’amour, mais un peu d’or, quelques bravos, quelques couronnes…

Une telle femme ne devait-elle point avidement s’élancer sur la main qui lui était offerte ? Ne devait-elle point avoir hâte et passion de conquérir rang de femme, elle qui